Ma Reine – Jean-Baptiste Andrea

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Audiolib – mars 2018 – 3h48 – Lu par Guillaume Jacquemont

L’Iconoclaste – août 2017 – 230 pages

Quatrième de couverture :
Shell n’est pas un enfant comme les autres. Il vit seul avec ses parents dans une station-service. Après avoir manqué mettre le feu à la garrigue, ses parents décident de le placer dans un institut. Mais Shell préfère partir faire la guerre, pour leur prouver qu’il n’est plus un enfant. Il monte le chemin en Z derrière la station. Arrivé sur le plateau derrière chez lui, la guerre n’est pas là. Seuls se déploient le silence et les odeurs de maquis. Et une fille, comme un souffle, qui apparaît devant lui : Viviane, la reine. Avec elle, tout s’invente et l’impossible devient vrai.

Auteur : Jean-Baptiste Andrea est né en 1971. Il est réalisateur et scénariste. Ma reine, publié chez L’Iconoclaste, est son premier roman.

Lecteur : Après une formation de comédien à l’E.S.C.A. du studio d’Asnières de 2014 à 2017, Guillaume Jacquemont joue dans Beaucoup de bruit pour rien de William Shakespeare mis en scène par Hervé Van der Meulen. En 2017, il reprend le rôle de Chérubin dans Le Mariage de Figaro, mis en scène par Jean-Paul Tribout, et joue dans Palestro mis en scène par Bruno Boulzaguet.

Mon avis : (écouté en avril 2018)

Shell est un garçon de 12 ans, « différent ». Il ne va plus à l’école et il vit avec ses parents qui tiennent une station service. Après avoir fait une grosse bêtise et faillit mettre le feu, il comprend que ses parents veulent l’éloigner. Aussi, pour prouver sa bravoure et qu’il est un homme, Shell décide de partir de chez lui vers les hauts plateaux situés autour de chez ses parents, pour aller faire la guerre. Mais nous sommes en 1965, en Provence, et derrière la montagne, il n’y a ni guerre, ni ennemi… Il fait seulement la rencontre de Viviane, une jeune fille mystérieuse, qui sera sa reine… Entre conte et poésie, cette histoire m’a laissée sur ma faim… Shell est un personnage attachant, mais j’ai fréquemment perdu le fil de l’histoire et j’étais perdue par certains passages que je ne reliais pas à l’histoire…
Cette lecture a donc été mitigée…

Extrait : (début du livre)
C’est le soleil qui m’a réveillé, il appuyait sur mes paupières avec ses pouces chauffés à blanc. J’ai mis un bras en travers de mes yeux pour continuer à dormir. Il y avait un grand calme autour de moi, juste le bruit de l’air qui poussait sur la terre, mais au milieu de ce calme, il y avait quelque chose d’autre, une forme sculptée par le vent, et j’ai fini par ouvrir les yeux.
Elle me regardait, assise sur le rocher, le menton sur les genoux et les bras autour. J’ai sursauté et elle aussi. On s’est regardés sans trop savoir quoi faire.
– J’ai cru que t’étais mort, elle a fini par dire.
Elle avait une drôle de voix rauque, une voix de femme qui n’allait pas avec son corps de fille. Elle était très mince, tellement qu’elle avait l’air de pouvoir se glisser entre deux rafales de vent sans déranger personne. Ses cheveux étaient courts et blonds avec une longue mèche sur le front, un genre de coupe de garçon. Mais ce sont ses yeux qui m’ont frappé, et quand je dis frappé j’ai vraiment eu l’impression de recevoir un coup, parce qu’ils avaient l’air en colère et que je n’avais rien fait.
J’ai répondu que non, je n’étais pas mort. Je voulais qu’elle me laisse tranquille, j’avais besoin de penser, c’était la première fois de ma vie que j’avais dormi loin de mes parents et il fallait que je réfléchisse pour comprendre ce que ça voulait dire, j’étais sûr que c’était important. Au lieu de me laisser tranquille, elle m’a regardé en fronçant les sourcils mais pas tout à fait comme le font les gens à qui je parle pour la première fois et qui ont toujours l’air étonné. Ça m’a énervé parce que c’était nouveau et que je n’aime pas trop ce qui est nouveau.
Elle m’a dit son nom alors que je ne lui avais rien demandé. Viviane. Quand j’ai voulu lui dire le mien, elle ne m’a pas laissé parler.
– Ça fait mal, ta figure ?
J’ai touché ma joue, c’était dur et râpeux là où j’avais frotté la falaise, ça piquait juste un peu. J’ai grogné. Ensuite elle a désigné mon blouson, mon beau blouson jaune avec les lettres rouges dans le dos.
– Shell, c’est un drôle de nom.
Et elle a éclaté de rire. C’était quelque chose de chouette, son rire, c’était frais et c’était agréable. Mais bon, je ne m’appelais pas Shell. Shell, c’est une marque d’essence et je lui ai dit. Elle s’en fichait, elle aimait Shell, n’importe quel autre nom m’irait moins bien, ce serait moche. Après ça je me voyais mal lui dire comment je m’appelais.
– C’est toi qui es moche, j’ai répondu à la place.
Sur le coup je n’ai pas trouvé mieux, et franchement c’était déjà bien envoyé. Tellement bien envoyé que Viviane a serré les dents, elle est descendue du rocher. J’ai cru qu’elle allait me sauter dessus. Je suis fort mais elle avait l’air vraiment en colère. Je n’étais pas très rassuré. Quand elle a parlé, sa voix m’a fait penser au vent.
– Je t’ai pas autorisé à parler, elle a dit.
– Je parle si je veux.
– Je te déteste.
– Moi aussi.
Elle a eu l’air de réfléchir, elle a regardé le ciel, puis la terre. Du bout du pied, elle a fait un petit trou dans la poussière.
– Tu fais quoi ?
J’ai respiré de toutes mes forces pour me faire plus gros.
– Je vais à la guerre.
– Quelle guerre ?
J’ai ricané. Quelle guerre? Elle ne regardait jamais la télé ?
– Celle de la télé.
– Pourquoi ?
Toutes ces questions, ça me fatiguait, j’avais l’impression de prendre une raclée sans qu’elle me touche.
– C’est comme ça, je lui ai répondu. Les hommes, ça va à la guerre.
Elle a craché par terre, et là non plus ça n’allait pas avec son corps de fille, mais ça allait avec la rage dans ses yeux. Elle m’a encore demandé :
– Pourquoi ?
– Pourquoi quoi ?
– Tu veux être un homme.
Je n’ai pas su quoi répondre. Ça n’a pas dérangé Viviane, elle a répondu pour moi.
– T’es un grand échalas d’imbécile. Voilà pourquoi.
Je ne connaissais pas échalas mais je connaissais imbécile, et ça ne m’a pas fait plaisir. J’ai serré les poings.
J’ai vu tout de suite que je lui avais fait peur. Autrefois j’allais à la chasse avec mon père, jusqu’au jour où le fils Martel avait été tué d’un mauvais coup de fusil parce qu’on l’avait pris pour un sanglier, et ma mère avait dit qu’elle ne voulait plus que j’y aille. Mais je me rappelais la tête d’un renard que les chiens avaient acculé, et Viviane faisait la même. J’ai tout de suite défait mes poings. Elle avait les larmes aux yeux. C’est idiot, mais ça m’a donné envie de pleurer aussi.
– Je te déteste, elle a répété.
– Je te déteste encore plus.
Elle a tourné le dos et elle est partie, et ça m’a presque soulagé de ne plus voir ses yeux. Plus loin, elle s’est retournée.
– Je reviendrai demain.
Je me suis mis à rire, des fois ça effrayait les gens quand je riais comme ça tellement c’était fort. Qu’est-ce qu’elle croyait ? Demain, je serais loin d’ici, je serais de l’autre côté du plateau, peut-être même déjà à la guerre. J’ai ouvert la bouche pour me moquer d’elle et j’ai dit :
– D’accord.

Petit bac 2018Animal (3)

Une réflexion sur “Ma Reine – Jean-Baptiste Andrea

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