Gallimard – novembre 2022 – 496 pages
traduit de l’anglais par Marguerite Capelle
Titre original : Bournville, 2022
Quatrième de couverture :
Bienvenue à Bournville, charmante bourgade proche de Birmingham connue pour sa célèbre chocolaterie. C’est à l’occasion de la victoire de mai 1945 que nous y rencontrons la petite Mary Clarke, émerveillée par les festivités organisées autour de sa maison. Elle y croise alors le chemin d’un certain Geoffrey Lamb, fils d’un collègue de son père travaillant aussi dans l’usine de chocolat. Nous retrouvons Mary et Geoffrey en 1953, fiancés et fascinés par le couronnement de la reine Élisabeth II que leurs familles respectives regardent ensemble sur le premier poste de télévision de Bournville. Treize ans plus tard, le couple a trois fils épris de football, qui s’extasient devant le match opposant les Anglais aux Allemands lors de la Coupe du monde de 1966. Nous les verrons à leur tour grandir et tracer leurs routes au fil de l’investiture du prince de Galles, du mariage de Charles et Diana, de la mort de cette dernière, de l’arrivée de Boris Johnson en politique, pour finalement retrouver Mary lors du 75ᵉ anniversaire de la Victoire, en plein confinement.En sept parties scandant les sept temps majeurs de l’histoire de l’Angleterre moderne, Le royaume désuni mêle brillamment les destins d’un pays dysfonctionnel, d’une irrésistible famille anglaise et d’une chocolaterie. Jonathan Coe signe ici un roman de grande ampleur dans la lignée si charming et piquante de Testament à l’anglaise et du Cœur de l’Angleterre.
Auteur : Jonathan Coe est né en 1961 à Birmingham. Après des études à Trinity College (Cambridge) et un doctorat à l’université de Warwick, il devient professeur de littérature. Son roman, « Testament à l’anglaise », le propulse sur la scène internationale. En 1998, il reçoit le prix Médicis étranger pour « La Maison du sommeil ». « Le miroir brisé » est son premier ouvrage pour la jeunesse. C’est confesse-t-il, »l’un de mes livres les plus politiques même si je lui ai donné la forme d’un conte de fées ».
Mon avis : (lu en mars 2023)
Dans ce roman, Jonathan Coe raconte avec humour et tendresse l’histoire d’une petite famille anglaise durant plus de 75 ans. Le lecteur suit les membres de la famille à l’occasion de sept événements historiques comme la Victoire du 8 mai 1945, le couronnement d’Elisabeth II, la coupe du Monde de football de 66, le couronnement du prince de Galles, le mariage de Charles et Diana, les funérailles de Diana et le 75ème anniversaire de la Victoire de 1945.
Le personnage central de cette histoire, c’est Marie Lamb, lors du prologue, situé à la veille de la pandémie, alors que l’Europe se confine pays après pays, Marie est une octogénaire veuve, mais entourée par ses enfants et petits-enfants.
En 1945, elle avait 11 ans, avec ses parents, ils vivaient à Bournville, petite ville proche de Birmingham, siège de la chocolaterie Cadbury. En 1958, pour le couronnement d’Elisabeth II, Marie et Geoffrey sont de jeunes fiancés, c’est également l’arrivée du premier téléviseur dans le quartier… En 1966, Marie et Goeffrey sont parents de trois garçons, l’aîné est passionné de football. Toute la famille est en vacances dans la campagne galloise lors de l’investiture du prince de Galles…
Il est question de l’ascension de Boris Johnson qui apparaît d’abord comme journaliste écrivant des articles plutôt mordants sur l’Union européenne. Il y a également quelques passages savoureux autour de la Guerre du chocolat qui pendant une trentaine d’années a opposé la Commission européenne aux lobbyistes britanniques. Jusqu’en 2003, l’importation du chocolat en provenance du Royaume-Uni était interdit à cause de son adjonction de matières grasses végétales, le nom « chocolat » était même contesté.
Un roman plein de charme où Jonathan Coe parvient à raconter l’histoire de son pays avec de l’autodérision, de l’humour, un soupçon de férocité. J’ai dévoré ce livre avec beaucoup de plaisir.
Extrait : (début du livre)
Il y avait si peu de monde dans le hall des arrivées de l’aéroport de Vienne que Lorna n’eut aucun mal à la repérer, bien que ce soit la première fois qu’elles se rencontraient. Elle avait des cheveux bruns et courts, une silhouette juvénile et des yeux marron qui s’éclairèrent quand Lorna passa la tête derrière le gigantesque étui de son instrument et dit :
« Susanne, c’est bien ça ?
— Bonjour, répondit cette dernière en étirant le mot avec un accent chantant, et puis, après un instant d’hésitation, elle serra Lorna dans ses bras en guise de bienvenue. On a encore le droit de faire ça, hein ?
— Bien sûr qu’on a le droit.
— Je suis tellement contente que tu sois enfin là.
— Moi aussi », lui retourna Lorna, par automatisme. Mais c’était la vérité.
« Le vol s’est bien passé ?
— Très bien. Pas grand monde.
— J’ai pris ma voiture. » Elle regarda avec une appréhension soudaine l’étui d’un noir luisant qui contenait la contrebasse de Lorna, et ajouta : « J’espère qu’elle sera assez grande. »
Dehors, il faisait presque assez froid pour qu’il neige, et les couronnes orangées des réverbères émaillaient sporadiquement l’air nocturne. Tandis qu’elles marchaient jusqu’au parking, Susanne posa d’autres questions à Lorna sur son vol (ils ont pris votre température, à l’aéroport ?), lui demanda si elle avait faim (non) et lui expliqua quelques détails concernant l’organisation des prochains jours. Lorna et Mark seraient logés au même hôtel, mais lui arrivait d’Édimbourg, et ne serait pas à Vienne avant le lendemain matin. Leur concert devait démarrer vers vingt et une heures, et le jour suivant ils prendraient le train pour Munich.
« Je ne peux pas vous accompagner pour les concerts en Allemagne, regretta-t-elle. Même si j’aimerais beaucoup. Simplement la maison de disques n’a pas le budget pour me payer le voyage. On fait tout avec très peu de moyens. C’est pour ça que tu as droit à ça, plutôt qu’à une limousine. »
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