Masse Critique Spéciale
Casterman – octobre 2022 – 336 pages
Quatrième de couverture :
Sol a une passion secrète depuis l’enfance : les chevaux. Quatre soirs par semaine, il quitte l’EHPAD où il est apprenti et tourne le dos aux tours de sa cité pour aller espionner des cours d’équitation qu’il ne peut pas se payer. Perché dans un arbre à l’orée de cet autre monde, il s’imagine cavalier, franchissant tous les obstacles de sa vie. Mais un jour la routine de Sol est bouleversée par une rencontre, Melissa, et un accident, celui de son meilleur pote Tatepa. Deux événements qui vont tout changer et mener Sol vers Homère, le cheval de ses rêves.
Auteur : Cécile Alix enseigne le théâtre et la relaxation aux jeunes enfants, et elle est formatrice auprès des futurs enseignants. En tant qu’autrice elle s’adresse principalement aux lecteurs 8-12 ans, mais également aux lecteurs adolescents, avec notamment A(ni)mal, paru aux éditions Slalom. Chez Casterman Jeunesse, elle est également l’autrice de la série Raoul Pigeon détective.
Mon avis : (lu en octobre 2022)
Sol est un adolescent silencieux et introverti. Il vit dans une cité, seul avec son père mais la communication avec ce dernier est difficile. Il est apprenti dans un EHPAD pour préparer un CAP d’agent d’entretien. Les relations avec les autres sont compliquées.
Depuis son enfance, Sol a une passion secrète, les chevaux et pour s’évader, il grimpe dans un arbre d’où il suit en cachette les entraînements du centre équestre, à califourchon sur une branche…
Il a heureusement un meilleur ami surnommé Tatepa. Mais voilà que Tatepa est victime d’un grave accident de moto et Sol se retrouve seul. Mais grâce à plusieurs rencontres à l’EHPAD et surtout celle de Mélissa, Sol va peu à peu s’ouvrir aux autres et croire en lui et à son avenir…
Sol et Tapeta ont une amitié est très touchante, ces deux garçons sont très différents mais complémentaires. Malgré leur éloignement, ils vont continuer à échanger et à se soutenir mutuellement en s’écrivant des lettres pleines de sincérité et d’humour. Et à distance, Tapeta va aider Sol à accéder à son rêve.
Ce roman jeunesse est très réussi, il est destiné aux plus de 13 ans mais tout peut aussi bien être lu par des adultes.
C’est un très beau roman, émouvant mais aussi plein d’humour.
Merci Babelio et les éditions Casterman pour cette très belle découverte.
Extrait : (début du livre)
Quand tu chantes, quand tu chantes…
Il s’appelle Sol.
Mmmm mm…
Dans sa tête, ça ressemble à un nuage d’orage. Ou à un buisson d’épines. À un buisson d’orage en nuage d’épines, gribouillé par un enfant. Il a le cerveau rempli de taches d’encre et de gros pâtés. Les traits s’enchevêtrent, les lignes se mélangent, il aimerait
trouver le point de départ, l’endroit où le crayon a commencé à tracer, attraper le fil, tirer patiemment et tout démêler. Par moments, ce fouillis dans sa tête le panique, il a envie de hurler : « Je fais comment, hein ? Je fais comment pour sortir de là ? »
Quand tu chantes, quand tu chantes…
Lorsqu’il avait cinq ou six ans, Sol aimait lâcher la main de son père dans la rue pour piquer un sprint. Son père criait : « Sol ! c’est dangereux, fais attention aux voitures, attends-moi ! » Il se lançait à sa poursuite et l’enfant redoublait de vitesse, se prenait pour Spirit, l’étalon des plaines. Il galopait en jetant des coups d’œil par-dessus son épaule et le trouvait beau, son père, avec ses mains tendues et son corps qui bondissait derrière en faisant le grand écart dans les airs. « Tu serais un danseur ! hurlait-il. Et moi je serais un cheval ! »
Quand tu chantes, quand tu chantes… Mmmm mm…
Au-dessus de sa tête, les merles sifflent leur rap. Becs jaunes, plumes noires. Sol accélère. Il a dix-sept ans. Derrière lui, son père ne cavale plus avec ses bras en l’air, mais il continue à se faire des films, imagine qu’à chaque foulée ses pieds ne touchent pas terre. Je serais un cheval qui danserait sur le bitume du trottoir.
Quand tu chantes, quand tu chantes…
Il aime le flow du matin, surtout au printemps. Un matin de printemps, ça nettoie les buissons d’orage, ça laisse de la place aux courants d’air. Les branches des peupliers se prennent pour des danseuses orientales, le ciel se reflète dans les vitres, il y a du pollen en suspension, tout est jaune, vert et bleu… il en oublie presque le béton crasseux des immeubles. Presque.
— Eh, Sol !
Tatepa le rattrape, pétarade à son niveau. Sa monture s’appelle 125YZ, c’est une Yamaha bleue, la prunelle de ses yeux.
Ils se connaissent depuis toujours. Sont nés dans le même hôpital à trois jours d’écart, habitent le même immeuble et sont devenus inséparables à partir du CP.