Alto – septembre 2005 – 328 pages
Denoël – février 2007 – 304 pages
Libretto – mai 2015 – 256 pages
Quatrième de couverture :
Canada, printemps 1989. Trois personnages à l’aube de leurs vingt ans ont quitté le lieu de leur enfance pour entamer une longue migration. Né quelque part au Manitoba, Noah Riel a appris à lire avec les cartes routières. Joyce Doucet, elle, a vu le jour à Tête-à-la-Baleine, et caresse des rêves de flibustier moderne. Quant au narrateur, il quitte le bungalow maternel pour voyager dans les livres, qu’il vend dans une bouquinerie de Montréal, et ne se sépare jamais d’un compas-boussole déréglé qui s’obstine à pointer la direction de l’îlot de Nikolski, dans le Pacifique Nord. Au terme d’une migration réelle ou symbolique qui s’achève en décembre 1999, « quelques heures avant la fin du monde », les membres de cette étrange trinité auront tant bien que mal compris ce qui les rassemble. Best-seller au Canada, couronné en 2006 par le prix des Libraires du Québec, Nikolski est l’un des romans les plus originaux et les plus talentueux de sa génération. Une impossible recherche des origines racontée avec bonheur et humour.
Auteur : Nicolas Dickner est né en 1972 au Québec. Il a étudié les arts plastiques et la littérature et, après avoir voyagé partout dans le monde, s’est installé à Montréal où il vit désormais avec sa famille. Nikolski, son premier roman, a connu un énorme succès aussi bien commercial que d’estime. Ont suivi un roman, des nouvelles et un ovni littéraire qui a pris la forme d’un almanach composé à quatre mains avec Dominique Fortier, auteure, entre autres, du roman Du bon usage des étoiles.
Mon avis : (lu en novembre 2021)
Ce roman « cartographique » québécois est une invitation au voyage. Le lecteur découvre trois personnages très différents en quête de leurs origines.
Le narrateur est anonyme, il travaille comme libraire dans une boutique de livres d’occasion à Montréal, il n’a jamais voyagé que par les livres et les guides de voyages. Il porte autour de son cou, un compas-boussole déréglé qui est un cadeau de son père. Ce compas-boussole, sans aucune valeur, s’obstine à pointer en direction de l’îlot de Nikolski, à la pointe sud de l’Alaska, un bout de l’océan Pacifique Nord. Un minuscule village habité par 36 personnes, 5 000 moutons et un nombre indéterminé de chiens.
Originaire du Saskatchewan, Noah a grandi dans une roulotte avec une mère qui a passé sa vie à traverser le pays dans tous les sens. Descendant d’Indien chipeweyan, il est né sur la route, il a appris à lire sur les cartes routières et il possède un livre difforme, sans couverture, le « Livre sans visage » que son père a laissé à sa mère. Noah rêve de quitter la route et il part pour Montréal faire des études. Noah veut devenir archéologue et se spécialise dans l’histoire étrange des poubelles.
Enfin Joyce, elle a grandie dans le village de pêcheurs de Tête-à-la-Baleine, dans le Golfe du Saint-Laurent, et elle ne rêve que de s’en échapper. Arrière-petite-fille de pirates, elle est décidée à se montrer digne de ses ancêtres. Elle part à Montréal et devient une pirate informatique. Elle construit et bricole des ordinateurs avec des vieilles machines et accessoires récupérés dans les poubelles de la ville.
Nos trois protagonistes ont des points en communs et vont se croiser de près ou de loin…
Un vrai roman d’aventure original, intelligent et plein de fraîcheur…
J’ai beaucoup aimé malgré une conclusion ouverte.
Extrait : (début du livre)
Mon nom n’a pas d’importance.
Tout débute au mois de septembre 1989, vers sept heures du matin.
Je dors encore, recroquevillé dans mon sac de couchage, étendu à même le plancher du salon. Autour de moi s’entassent les boîtes de carton, les tapis enroulés, les meubles à moitié démontés et les coffres à outils. Plus rien sur les murs, que les taches claires laissées par des cadres suspendus là de trop nombreuses années.
Par la fenêtre, on entend le rythme monotone des vagues qui déferlent sur les galets.
Chaque plage possède une signature acoustique particulière, qui varie selon la force et la longueur des vagues, la nature du sol, la morphologie du paysage, les vents dominants et le taux d’humidité dans l’air. Impossible de confondre le murmure feutré de Mallorca, le roulement sonore des cailloux préhistoriques du Groenland, la musique des plages coralliennes du Belize ou le grondement sourd des côtes irlandaises.
Or, le ressac que j’entends ce matin est aisément identifiable. Cette rumeur grave, un peu grossière, le son cristallin des galets volcaniques, le retour de vague légèrement asymétrique, l’eau riche en matières nutritives – il s’agit de l’inimitable ressac des îles Aléoutiennes.
J’entrouvre l’œil gauche en maugréant. D’où provient cet invraisemblable bruit ? L’océan le plus proche se trouve à plus de mille kilomètres d’ici. D’ailleurs, je n’ai jamais mis les pieds sur une plage.
Je m’extirpe du sac de couchage et titube jusqu’à la fenêtre. Accroché aux rideaux, je regarde la benne à ordures s’arrêter devant notre bungalow dans un couinement d’air comprimé. Depuis quand les moteurs diesels imitent-ils le ressac ?
Douteuse poésie de banlieue.
(9) Lieu