Actes Sud – novembre 2023 – 432 pages
traduit du suédois par
Titre original : Havsörnens skrik, 2022
Quatrième de couverture :
Le Nord de la Suède est devenu le nouvel eldorado vert, attirant des grandes entreprises avides qui ne reculent devant rien pour s’enrichir, tandis que des bandes criminelles agissent dans l’ombre, prêtes à tout pour se tailler la meilleure part du gâteau. Mikael Blomkvist et Lisbeth Salander se retrouvent malgré eux au milieu d’une bataille sans merci, où les forces du mal sont prêtes à tout pour faire fortune. Et où les hommes n’aiment toujours pas les femmes.
Karin Smirnoff reprend les rênes de la saga Millénium et signe avec “La Fille dans les griffes de l’aigle” un thriller palpitant et d’une actualité brûlante avec, en toile de fond, les conflits mal assumés des pays nordiques à l’heure de la transition écologique.
Auteure : Née à Umeå en 1964, Karin Smirnoff vient, à l’instar de Stieg Larsson, le créateur de la saga« Millénium», des forêts infinies du Nord de la Suède.
Mon avis : (lu en décembre 2023)
Lorsque j’avais appris que David Lagercrantz arrêtait la série, je n’avais pas imaginé que quelqu’un d’autre prendrait la suite, et pour moi, c’était un dernier adieu à Mikael Blomkvist et Lisbeth Salander…
Quelle plaisir de retrouver Mikael et Lisbeth pour de nouvelles aventures !
L’intrigue se situe dans le grand Nord de la Suède, à Gasskas où le maire, Henry Salo, rêve d’un grand développement économique pour sa région et tous les moyens sont permis… Il a comme projet l’aménagement du plus grand parc éolien d’Europe et pour cela il lui faut racheter de nombreux terrains que les locaux n’ont aucune envie de céder…
Mikael Blomkvist arrive à Gasskas pour assister au mariage de sa fille avec Henry Salo, qu’il ne connait pas encore mais dont la première impression ne le rassure pas… Mikael est heureux de retrouver sa fille et son petit-fils Lukas mais n’est pas convaincu par ce mariage… Il décide donc d’enquêter sur son futur gendre.
En parallèle, Lisbeth Salander est également dans le coin. Elle se retrouve responsable de Svala, sa nièce âgée de 13 ans dont elle ne connaissait pas l’existence. La mère de Svala Sandberg a disparu et sa fille est prête à tous les dangers pour la retrouver. Svala est un genre de Lisbeth en miniature… Elle est Sami par sa mère, elle est très intelligente et a une mémoire prodigieuse. Ce nouveau personnage est vraiment très attachant. Évidemment, pour notre plus grand plaisir, Mikael Blomkvist et Lisbeth Salander se retrouvent à enquêter ensemble…
Ce roman policier est le premier d’une nouvelle trilogie et j’ai vraiment hâte de découvrir les prochains épisodes…
Extrait : (début du livre)
LE NETTOYEUR REGARDE L’HEURE. Quarante et une secondes se sont écoulées entre le moment où il a rempli l’appât de charogne et l’arrivée du premier aigle, une femelle.
Il ne sait jamais précisément d’où ils vont surgir. Ils peuvent nicher dans un arbre tout près. Ou planer à des hauteurs incroyables. Leur acuité visuelle deux cents fois supérieure à celle de l’homme leur permet de détecter une proie à des kilomètres. Caché à cinquante mètres de là, le Nettoyeur observe le festin à travers ses jumelles.
Appât rempli de charogne en six lettres. Festin. Il serait faux de qualifier d’amour paternel la tendresse qu’il ressent pour les oiseaux – il n’y connaît rien. Pourtant, il ne peut s’empêcher de les considérer comme ses enfants. Il pense à eux avant de s’endormir le soir. Et dès son réveil. Qu’il coupe du bois, prépare à manger ou allume le feu : ils occupent son esprit durant toutes les tâches du quotidien. Se sont-ils accouplés ? Les oisillons vont-ils survivre ? Trouvent-ils assez de nourriture ? Parviendront-ils à passer l’hiver ? Oui. Avec son aide et grâce à une saison riche en campagnols, ils passeront l’hiver.
Il passe la main sur ses yeux. Le soleil, plus haut dans le ciel désormais, lui chauffe le dos, peut-être pour la dernière fois de l’automne. Aucune importance. C’est dans un coin du monde oublié des hommes que se trouve sa maison. “Maison” est peut-être exagéré. Une cabane en rondins, abandonnée après la disparition des derniers forestiers, au début des années 1960. Depuis, ces terres ont été classées réserve naturelle.
Le terrain, accidenté, est composé d’un magma de forêt primaire, d’étangs, de tourbières et de rochers. Aucun véritable chemin ne permet d’y accéder. Hormis les pistes animales, les vestiges d’une route forestière disparaissent peu à peu, effacés par la nature qui reprend ses droits. Impossible d’y accéder autrement qu’à pied ou en quad. Encore faut-il trouver.
Le premier sentier est à plus d’une dizaine de kilomètres de la cabane. Lui ne se déplace que dans un faible périmètre. Au début, il utilisait des branches pour marquer les directions afin de ne pas se perdre. Il dispose d’un ruisseau pour pêcher, des chablis comme réserve de bois et de jolies clairières pour observer les oiseaux et le petit gibier.
La cabane est un refuge, modernisé sommairement au moyen d’un groupe électrogène qui lui sert à charger son portable. Il n’est personne. Un homme sans nom, sans passé et sans avenir. Il ne fait qu’exister. Au jour le jour. Se couche tôt. Se réveille à l’aube. Il fait ce qu’il a à faire sans se préoccuper de savoir si c’est bien ou mal.
Des dates sont gravées dans le bois des murs. Des noms. Des messages adressés à l’avenir de la part d’autres hommes solitaires : Olof Persson 1881. Lars Persson 1890. Sven-Erik Eskola 1910. Et ainsi de suite. Mais la solitude est relative. Des mois peuvent s’écouler sans qu’il ne s’adresse à personne d’autre qu’à lui-même, aux oiseaux, aux arbres ou encore aux pierres. Pourtant, il se sent moins seul que jamais. C’est comme si son enfance l’avait rattrapé. Au fil des jours, il se rapproche du garçon qu’il fut autrefois et qui trouvait refuge dans la forêt. Il apprend comment marche le monde en observant, immobile, la parade du coq de bruyère au printemps, en étudiant la façon dont la renarde s’occupe de ses petits à mesure qu’ils grandissent, en regardant s’affairer des fourmis dans leur nid ou en suivant le parcours des scolytes dans les sapins.
Le garçon a un père. Un grand enfoiré avec des bras dont on ne peut s’échapper. Le garçon a une mère. Personne ne compte sur elle. Le garçon a un frère. Cours, dit celui-ci quand le père rentre, et le garçon s’enfonce dans la forêt.
Déjà lu de la même série :
Les trois tomes de David Lagercrantz
Millenium 4 – Ce qui ne me tue pas
Millenium 5 – La fille qui rendait coup pour coup
Millenium, tome 6 : La fille qui devait mourir
Les trois premiers tomes par Stieg Larsson :
Millénium 1 : Les hommes qui n’aimaient pas les femmes
Millénium 2 : La fille qui rêvait d’un bidon d’essence et d’une allumette
Millénium 3 : La reine dans le palais des courants d’air
Déjà écouté :