Vie de Gérard Fulmard – Jean Echenoz

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Audiolib – Lu par Dominique Pinon

Minuit – janvier 2020 – 235 pages

Quatrième de couverture :
La carrière de Gérard Fulmard n’a pas assez retenu l’attention du public. Peut-être était-il temps qu’on en dresse les grandes lignes. Après des expériences diverses et peu couronnées de succès, Fulmard s’est retrouvé enrôlé au titre d’homme de main dans un parti politique mineur où s’aiguisent, comme partout, les complots et les passions. Autant dire qu’il a mis les pieds dans un drame. Et croire, comme il l’a fait, qu’il est tombé là par hasard, c’est oublier que le hasard est souvent l’ignorance des causes.

Auteur : Jean Echenoz est né à Orange en 1947. Il a obtenu le prix Médicis en 1983 pour Cherokee et le prix Goncourt en 1999 pour Je m’en vais. Toute son œuvre est publiée aux Editions de Minuit. Pour Audiolib, il a déjà lu Courir, Des éclairs, 14 et Ravel. Il a reçu en 2018 le prix SCAM Marguerite Yourcenar pour l’ensemble de son œuvre.

Lecteur : Ancien élève du Cours Simon, Dominique Pinon a débuté au cinéma avec Jean-Jacques Beineix. Il rencontre Jean-Pierre Jeunet et Marc Caro et c’est Delicatessen, La Cité des enfants perdus, Le fabuleux destin d’Amélie Poulain… Il poursuit une carrière hors normes, à l’écran comme à la scène, de Shakespeare, Beckett à Labiche. Grand lecteur, Dominique Pinon a enregistré pour Audiolib, entre autres, Le Hobbit, Prix Lire dans le Noir 2013 et L’extraordinaire voyage du Fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea, Prix Audiolib 2014, Héloïse, ouille ! et La Fontaine, une école buissonnière.

Mon avis : (écouté en avril 2020)
Jean Echenoz est un auteur dont j’apprécie les livres que j’ai eu l’occasion de lire. Mais pour celui-ci, j’ai été très déçue. L’auteur s’empare du genre polar, d’une manière très personnelle.
Le livre s’ouvre sur la chute fracassante d’un fragment de satellite soviétique obsolète sur un centre commercial voisin de la rue Erlanger, Paris XVIème où vit seul le narrateur et anti-héros Gérard Fulmard. Ce dernier est un ancien steward, licencié pour faute et qui a l’obligation d’aller chez un psychiatre deux fois par mois.

Bien décidé à prendre sa vie en main, Gérard Fulmard voit l’opportunité de devenir détective privé et accepte comme premier client un parti politique pas très net. Débutant, maladroit, il est souvent manipulé à son insu et ses résultats seront bien maigres…
L’intrigue est des plus farfelues, les différents personnages sont hauts en couleur comme par exemple les frères Apollodore et Ermosthène Nguyen, deux gardes du corps amateurs de jeu de go…
La rue Erlanger est également un véritable personnage, lors de digressions nombreuses, l’auteur évoque plusieurs évènements qui ont eu lieu dans cette rue. Cependant, Jean Echenoz a préféré ne pas faire référence au dernier évènement tragique datant du 5 février 2019 : le terrible incendie volontaire du 17 bis qui fit dix morts.
C’est très bien écrit, riche en vocabulaire mais l’histoire n’a vraiment ni queue, ni tête et je me suis vite ennuyée. Seule chose amusante pour moi, le lieu où se passe l’intrigue est mon quartier d’enfance et que je pouvais visualiser les lieux.
Pour la version audio, la voix posée et expressive de l’acteur Dominique Pinon est toujours très agréable à écouter.

Extrait : (début du livre)
J’en étais là de mes réflexions quand la catastrophe s’est produite.

Je sais bien qu’on en a déjà beaucoup parlé, qu’elle a fait éclore de nombreux témoignages, donné lieu à toute sorte de commentaires et d’analyses, que son ampleur et sa singularité l’ont érigée en classique des faits divers de notre temps. Je sais qu’il est inutile et peut-être lassant de revenir sur cette affaire mais je me dois de mentionner l’un de ses contrecoups car il me touche de près, même s’il n’en est qu’une conséquence mineure.
Propulsé à une vitesse de trente mètres par seconde, un boulon géant – format de sèche-cheveux ou de fer à repasser – est entré en force par la fenêtre d’un appartement, au cinquième étage d’un immeuble de standing, désagrégeant ses vitres en ébréchant son embrasure et, en bout de course, son point d’impact a été le propriétaire de cet appartement, un nommé Robert D’Ortho dont le boulon a ravagé la région sternale et provoqué la mort subite.
D’autres boulons s’en sont tenus à des dommages matériels, l’un défonçant une antenne parabolique, l’autre éventrant le portail d’une résidence située face à l’entrée du centre commercial. Épars, on en trouverait encore pas mal, plus tard, de ces boulons, au fil des investigations menées par des agents porteurs de combinaisons blanches, cagoulés et gantés. Mais ce ne seraient là qu’effets secondaires, épiphénomènes du désastre majeur qui vient de frapper la grande surface elle-même.
L’état de cet hypermarché, de fait, est désespérant. Depuis les débris de sa toiture effondrée s’élève une brume de poussière lourde qu’ajourent les hésitantes flammèches d’un incendie naissant. Dentelé, crénelé, ce qui reste de ses murs porteurs laisse voir à nu leur poutraison métallique griffue, deux d’entre eux se penchent l’un vers l’autre en rupture d’équilibre au-dessus de la zone de choc. La verrerie de ses façades, d’ordinaire constellée d’annonces promotionnelles, offres aguicheuses et slogans arrogants, se retrouve zébrée de pied en cap et disloquée aux angles. Dressés devant l’accueil, trois lampadaires se sont affaissés en s’embrassant, entortillant leurs têtes d’où pendillent les ampoules à vapeur de sodium, disjointes de leur douille. Quelques voitures, sur le parking attenant, ont été renversées sous la puissance du souffle, d’autres bossuées par des heurts de matières et, sous leurs essuie-glaces en parenthèses tordues, l’ensemble des pare-brise fait à présent défaut.

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