Les vallées closes – Mickaël Brun-Arnaud

71oidTa9nfL Robert Laffont – janvier 2023 – 288 pages

Quatrième de couverture :
 » Comment ce monde incolore avait-il eu la cruauté, l’impertinence, la folie, de faire naître en son sein un garçon en couleurs ?  » Qui peut dire ce qu’il s’est vraiment passé cette nuit où Paul-Marie, employé de mairie bien sous tous rapports, a recueilli chez lui Enzo, jeune adulte atteint de déficience intellectuelle ?
Dans ce village reculé de Provence où les préjugés sont rois et où l’on condamne toute forme de différence, la vérité importe peu. Et Paul-Marie est contraint de se cacher dans le grenier de Claude, sa mère, pour échapper à la vindicte populaire.

Auteur : Mickaël Brun-Arnaud est le fondateur de la librairie parisienne Le Renard Doré – librairie de référence pour le manga et la culture japonaise. Paru en mars 2022 à l’École des loisirs, son premier roman jeunesse, Mémoires de la forêt, s’est vendu à près de 10 000 exemplaires en l’espace de quelques mois. Les Vallées closes est son premier roman de littérature générale.

Mon avis : (lu en mars 2023)
J’ai emprunté ce livre à la Bibliothèque, attirée par sa couverture lumineuse… Comme un coucher soleil.

L’ambiance dans  ce roman est celle des campagnes, d’une petit village provençal où tout le monde se connaît, et où les ragots vont bon train.
Le lecteur découvre cette histoire à travers 3 points de vues, ceux de Claude, Enzo et Paul-Marie, avec des aller-retour dans le temps : décembre 2016, avril 2016, mai 2016 avec un retour dans l’enfance de Paul-Marie en 1979.
Claude a 70 ans, elle a son franc parlé. Elle n’a pas eu une vie facile et elle est prête à tout pour protéger son fils. Depuis plusieurs mois, suite à une accusation contre son fils Paul-Marie, Claude subit l’hostilité du village.
Enzo, 20 ans, déficient mental est surprotégé par sa mère Geneviève. Il souhaiterai avoir plus d’autonomie et une vie amoureuse. Il travaille dans un centre se consacrant à l’élevage de chèvres et à la production artisanale de fromages, hanté par l’univers des Pokémon.
Paul-Marie 44 ans, est le fils de Claude. Enfant, il a toujours été craintif et sensible. Incompris par un père plutôt « beauf », heureusement il y avait Danny, son grand frère, pour le protéger.
Que s’est-il passé entre Paul-Marie, fonctionnaire quadragénaire, bien sous tous rapports et Enzo, son stagiaire, jeune adulte handicapé mental ?

Extrait : (début du livre)
L’eau qui ruisselait du toit donnait à Claude, avachie sur son vélo, l’impression que la maison avait du chagrin. Les métaphores, pour elle qui n’en utilisait presque jamais, n’étaient que des mots gorgés d’une pluie dans laquelle on infusait ses sentiments : du pisse-mémé inutile, pestait-elle en massant vigoureusement sa hanche avant de reprendre la route, comme pour en racler l’arthrose. Cette pluie-là, métaphore ou non, elle tombait sans relâche sur les champs misérables depuis la mi-novembre ; et si les nuages se voulaient pour certains des bénitiers célestes, pour Claude rien ne laverait jamais ses terres natales des péchés qui y grouillaient. Engourdie, la septuagénaire soupira en regardant sa vieille ferme étriquée à trois étages. Après ses courses, elle allait encore devoir en gravir les marches, sans rambarde ni ascenseur – et sans la moindre volonté que ça change.
Comme Claude, la maison avait vécu. Les murs de la baraque étaient constellés de cloques prêtes à éclater si on les perçait du doigt ; une peau gorgée des furoncles du temps, boursouflée de cris, abcès de frustrations et de colères passées. Claude avait si souvent surpris Marius, la peinture sous les ongles, arrachant le crépi qui s’émiettait comme la croûte du pain de la veille. « T’sais bien, Claudette, j’ai jamais aimé ce qui dépasse », grognait-il sans arrêt, ses doigts sales dans la bouche, les incisives tachées du sang de ses cuticules et de la crasse de ses chantiers.
Et il a mis un point d’honneur à le prouver tout au long de sa vie, ce con, songea Claude en saisissant le guidon de son vélo rouillé pour rejoindre le centre-ville.
Le pied sur la pédale, elle eut un dernier regard ennuyé pour les combles humides de la bâtisse où machinalement, même après la mort de Marius, elle continuait de cacher tout ce qui dépassait ; à l’endroit exact où jadis, parce qu’il se voyait trop sous sa poitrine, elle avait remisé son cœur.

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