Le Rouergue – août 2017 – 192 pages
Quatrième de couverture :
Durant une année, le quotidien d’une jeune enseignante de primaire, Emma, nommée dans un quartier populaire, confrontée à des enfants en grandes difficultés scolaire, affective, sociale. Elle s’attache notamment à Ryan, un garçon dont on va progressivement découvrir la maltraitance. Un roman d’une grande force, à la fois émouvant et politique, dans le meilleur sens du terme : quelle école et quelle société voulons-nous pour nos enfants ? Rachel Corenblit a été enseignante en primaire puis formatrice d’enseignants pendant dix-huit ans. Elle s’est inspirée de son expérience professionnelle pour écrire ce roman.
Auteure : Rachel Corenblit vit à Toulouse avec son mari et ses deux enfants. Professeur de lettres en collège, elle est l’auteur de nombreux romans pour la jeunesse, publiés au Rouergue et chez Actes Sud Junior, ainsi que de deux romans dans la brune, Quarante tentatives pour trouver l’homme de sa vie (2015) et Les attachants (2017).
Mon avis : (relu en mai 2021)
Lorsque j’ai emprunté le livre L’année des pierres, je me rappelais avoir déjà lu un livre de Rachel Corenblit, celui-ci, mais impossible de retrouver le billet fait à l’occasion de cette lecture… Un oubli que j’ai voulu rattraper en le relisant.
Après plusieurs mois de vacations dans différentes écoles, Emma, jeune enseignante, vient d’être nommée à son premier poste fixe à l’école des Acacias, dans un quartier défavorisé de Toulouse. Durant une année scolaire, elle raconte son quotidien avec ses élèves : Ryan, Michel, Caïn, Dimitri, Karima, Molly, Myriam, Yaël, Emir, Lola, Allan…
Des enfants en difficultés, à la fois attachants et « attachiants » qui vivent chez eux des choses difficiles voir dramatiques et pour qui l’école est un havre de paix…
Un récit touchant, authentique qui ne laisse pas indifférent. Un coup de cœur.
Extrait : (début du livre)
Le gamin se tenait devant la porte, qu’elle avait laissée entrebâillée.
Emma. Elle s’appelle Emma. Elle trouve son prénom trop simple. Elle aurait adoré se nommer Iphigénie ou Cassandre. Un prénom qui résonne, qui a une histoire. Élisabeth, ou même Athéna. On ne prononce pas Athéna de façon anodine. Les références collées au nom que l’on porte, c’est comme si on avait déjà vécu une vie.
Elle enseigne depuis quelques années, pas trop longtemps mais suffisamment pour avoir des réflexes. Elle sait qu’il vaut mieux, pour certaines familles, qu’elles trouvent une porte ouverte. Tout l’art de la première rencontre. Gérer les imprévus. Frapper à une porte, c’était comme demander une autorisation et pour ces familles-là, demander une autorisation, n’importe laquelle, c’était délicat.
Il la fixait, silencieux, avec son cartable dans le dos, ses cheveux ébouriffés et sa grande bouche aux lèvres gercées. Il était immense, pour son âge, sa veste trop courte laissait apparaître des poignets fins de fille et ses bras étaient des brindilles fragiles, tout comme ses longues jambes.
Il a attendu, sans se signaler, qu’Emma lui fasse signe d’entrer et il s’est avancé lentement, comme s’il se méfiait. Une drôle de démarche, un peu bancale, pas rassurée. Sa mère s’était imposée à ses côtés, avec deux autres petits enfants. À vue de nez, deux, trois ans, pas plus. Incapables de rester immobiles. La femme les tenait par la main, un à gauche et l’autre à droite, et ils l’écartelaient en grognant, sans paroles, en reniflant, débraillés et hirsutes.
Emma s’est levée et s’est approchée, sans faire de grands gestes, sans les effrayer. Pas de brusquerie, de maladresse. Songer aux animaux craintifs qu’on essaie de ne pas faire fuir. Mais il était huit heures vingt-cinq. Elle devait protester, pour le principe. Elle était contrariée. Ce n’était pas sérieux, pas correct, totalement malpoli. Ils avaient rendez-vous une bonne quarantaine de minutes avant, afin qu’elle ait le temps de présenter à Ryan sa nouvelle école, sa classe, les cahiers, les manuels. Un bon moment qu’elle attendait, assise derrière son bureau, à aligner des feuilles photocopiées. À tenter de relativiser ce retard. On ne fait pas exprès de rater la première journée de son enfant. Ce n’est pas un acte qu’on prémédite.
(4) Adjectif
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