Casterman – août 2019 – 412 pages
Quatrième de couverture :
Ce n’est pas parce qu’on est tous paumés et loin de chez nous qu’on se ressemble.
Ce n’est pas parce qu’on devient amis que les choses seront plus simples.
Ce n’est pas parce qu’ils nous prennent pour cibles qu’ils sont nos ennemis.
Ce n’est pas parce qu’on est montés dans ce bus qu’on en redescendra indemnes.
Auteur : Après des études de philosophie, Rachel Corenblit se tourne vers l’enseignement en 1997. Elle exerce aujourd’hui à Toulouse en tant que professeur des écoles. Elle est l’auteur de plusieurs romans.
Mon avis : (lu en mai 2021)
En empruntant ce livre à la bibliothèque début avril, je n’imaginais pas qu’il serait malheureusement d’actualité…
Daniel, Christophe, les jumelles Anna et Anaïs, Jérémy et Sonia, cousin et cousine, Amir, Benjamin, Rose, Lucille sont pensionnaires au lycée français de Jérusalem. En décembre 1987, ils sont en excursion dans un autobus en direction du mur de Jéricho et soudain ils deviennent la cible de Palestiniens en colère, le bus est attaqué à coup de pierres…
Mon avis sur ce livre est mitigé car j’ai peiné à le lire… Cela commence fort avec le cœur de l’histoire soit l’attaque. Ensuite, Daniel est le narrateur et il raconte l’histoire des dix adolescents et comment ils se sont retrouvés là, ensemble ce jour-là. La plupart n’a pas choisi de passer cette année en Israël. Ils ont 16 ans et des préoccupations de leur âge. Ils sont très loin du conflit israélo-palestinien qui se passe autour d’eux… Il y aura un avant plutôt insouciant et un après cette attaque brutale où les jeunes vont s’interroger sur leur avenir…
Je suis contente d’avoir pu terminer cette lecture mais j’ai trouvé qu’elle manquait de rythme et que les nombreuses histoires des dix protagonistes brouillaient le message de l’absurdité de cette guerre et des multiples impacts qu’il en découle.
Extrait : (début du livre)
Décembre1987
La terre est rouge. Diluée dans les roches, le sable, et des palmiers encadrent la route qui longe la ville, comme au garde-à-vous.
La terre est rouge et absorbe la chaleur du soleil. Elle l’incorpore. Elle la digère. On pourrait presque la voir bouillir, cette terre qui forme sur le bas-côté des tas inégaux, des ondulations que le vent défait.
C’est Jéricho, quoi, quand même, avec ses trompettes et ses murs, son folklore. Les bus de touristes passent devant avec les guides à bord, qui doivent raconter toujours la même histoire, la légende, la Bible. Les textes saints. Au micro, ça décrit l’effondrement des murailles et certains se penchent derrière les vitres teintées pour les apercevoir. Ça blablate, ça brode, ça enjolive un passé de massacres et d’apocalypse.
Mais ils sont où, ces murs que Dieu a fait s’écrouler ?
Est-ce qu’on peut les contempler ?
Ils sont déçus, un peu, les gens, avec leurs appareils photo en bandoulière, leurs casquettes vissées sur le haut du crâne, leur Coca frais dans la glacière, de ne rien voir, que les façades des maisons récentes qui ressemblent à des ruines à force d’être toujours en construction, jamais achevées. Les toits plats, les minarets, les falaises derrière, d’un rouge plus pâle, presque roses dans leur élancement vers le ciel.
Bleu, le ciel. Il n’a pas beaucoup plu, cette année, à se demander comment le Jourdain trouve la force de couler, où il puise son eau, ce brave ruisseau, ce ruban silencieux qui va s’abandonner dans la mer Morte, un filet, essoufflé et si courageux.
Il en faut du courage pour traverser cette terre.
Verte aussi par endroits. Des champs. Des plantations que les touristes n’identifient pas forcément et de toute façon, ils s’en fichent. Ils veulent du divin, du passé, de l’émotion archéologique. Et pourtant, ces carrés, ces rectangles, toute cette géométrie, vue du ciel, doit être belle. Esthétique. Un vert passé, usé, qui résiste au goutte-à-goutte des cieux, que les hommes cultivent et parfois, abandonnent. Alors la route se parsème, sur les bas-côtés, d’un jaune fané, brûlé, rogné comme des regrets. Comme si plus rien ne valait la peine. Comme si ce pays achevait l’espoir de ceux qui tentaient de le faire croître et multiplier.
C’est Jéricho, donc.
À deux cents mètres sous le niveau de la mer. On peut s’imaginer qu’un beau jour, prise de folie, celle-ci déborde : des plages de Tel-Aviv, la voilà qui remonte vers Jérusalem, dépasse les collines, suit les traces de la route qui s’élance vers les hauteurs. Emportée par son élan, elle engloutit tout sur son passage. Le mur des Lamentations et l’esplanade des Mosquées et le Saint-Sépulcre. Elle plonge vers la vallée du Jourdain pour la recouvrir. Au nord, Jéricho et plus loin, la Galilée. Au sud, la mer Morte, ses boues noires, ses eaux trop salées. Elle comble le trou, elle rétablit l’équilibre et remet les niveaux à zéro.
Ce serait peut-être une solution.
Que la mer se révolte et qu’elle emporte sur son passage les hommes, leurs monuments, leurs querelles, leurs empreintes, leurs mensonges et leurs dieux. Qu’il ne reste rien d’eux.

(4) Objet
Déjà lu du même auteure :